Michel SCHNEIDER, Une mutation anthropologique

« Une mutation anthropologique affecte la subjectivité en démocratie : au nom de l’affirmation de soi elle annonce la fin de l’individu soumis au social. La façon de se penser en société en effet a changé. L’individu qui hier se définissait par ses appartenances se définit aujourd’hui par ses choix (…). Jamais n’ont été si dépendants du collectif nos concitoyens qui clament leur indépendance personnelle. Jamais les individus n’ont été aussi sûrs d’être eux-mêmes que lorsque la postmodernité les somme d’être comme les autres. Symptôme de cet individualisme de masse, le recours dans les énoncés courants, comme dans la plupart des romans, au pronom indéfini on à la place de nous et même de je dans l’insupportable : on va dire. Hommes sans qualité mais non sans tensions et prétentions d’en montrer, les individus emploient ce on anonyme asexué, et collectif à la place du sujet. Ils composent ce que Valéry appelait « un peuple d’uniques ».

 

Michel Schneider, Big Mother, Psychopathologie de la vie politique, Ed Odile Jacob, 2002, P 158-159

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