Le sexe, un détail en peinture ?

Si le nu est présent dans toute l’histoire de l’art, la représentation du sexe en lui-même, tantôt érotisé tantôt dissimulé par souci de pudeur, a constamment fait l’objet de débats.

"L'Amour victorieux" du peintre italien Le Caravage, 1601-1602, exposé aux Écuries du Quirinal pendant l'exposition "Caravage", février 2010, Rome.
« L’Amour victorieux » du peintre italien Le Caravage, 1601-1602, exposé aux Écuries du Quirinal pendant l’exposition « Caravage », février 2010, Rome. Crédits : Getty

C’est la découverte du croquis d’un sexe masculin sur le col d’un des protagonistes de la scène dépeinte, dans le tableau de Caravage intitulé Les Tricheurs, qui rappelle à quel point la représentation du nu dans l’art a toujours été l’objet de fascination et de censure,  plus ou moins contournée. Cela nous amène également à nous demander quelle est la place du détail en peinture et sur ce qu’il ajoute à l’impression globale qu’engendre l’œuvre sur le spectateur. Selon Jérémie Koering, le détail a pour fonction, chez Caravage, d’affirmer « l’évidence du visible dans sa double part référentielle et construite ». Un gant troué, les coins cornés des cartes de jeu, une dentelle travaillée, les motifs du tapis, tout concourt à donner consistance à la représentation. Est-ce des symboles qui suggèrent des réalités cachées ou des signes qui dénotent la puissance de la peinture, partagée entre opacité et transparence ? Est-ce, dans le cas des tableaux religieux, le moyen de donner une interprétation naturaliste de l’histoire sainte, de traduire le vrai ? Et qu’en est-il de la représentation du sexe, cet objet licencieux qui n’a jamais cessé d’être montré en même temps que caché ? Qu’est-ce que cela révèle des normes de décence et de leurs perpétuelles transgressions dans l’histoire de l’art ?

  • Les invités : Philippe Comar, écrivain, professeur à l’Ecole nationale des Beaux-Arts, commissaire d’expositions dont « Masculin masculin : l’homme nu dans l’art de 1800 à nos jours » et auteur de l’essai L’homme nu publié en 2013, co-auteur avec Nicolas Guilbert de Voir et regarder l’art publié aux éditions Herscher en 2021 et Jérémie Koering, professeur d’histoire de l’art moderne à l’université de Fribourg, auteur de Les iconophages : une histoire de l’ingestion des images paru aux éditions Actes Sud en 2021 et de Caravage, juste un détail, publié en 2019 aux Editions de l’INHA.
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