La fin des temps (Patrick Modiano)


« Une nuit d’il y a quelques mois, très tard, j’avais allumé la télévision qui diffusait une série policière anglaise, adaptée du Saint de Leslie Charteris, et j’ai eu la surprise de voir apparaître Eugène Deckers. La scène avait été tournée dans le Londres des années soixante, peut-être la même année et la même semaine que celles où Deckers était venu au « pot d’adieu ». Là, sur l’écran, il traversait un hall d’hôtel, et je me disais qu’il était vraiment étrange que l’on puisse passer d’un monde où tout s’abolissait à un autre, délivré des lois de la pesanteur et où vous étiez en suspension pour l’éternité : de cette soirée rue Froidevaux, dont il ne restait rien, sauf de faibles échos dans ma mémoire, à ces quelques instants impressionnés sur la pellicule, où Deckers traverserait un hall d’hôtel jusqu’à la fin des temps. »

Chien de Printemps, Seuil éd, 1993, p. 89-90

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