les dimanches soir (Patrick Modiano)

« Je me suis demandé quels pouvaient bien être les clients de cet endroit. Les membres d’une confrérie qui se communiquaient l’adresse à voix basse ou bien, le temps n’ayant plus cours dans cette rue, des gens égarés autour d’une table, pour l’éternité ? Je ne savais plus très bien pourquoi j’avais échoué ici. Sans doute était-ce le départ d’Hélène Navachine qui me causait ce sentiment de malaise. Et puis nous étions un dimanche soir, et les dimanches soir laissent de drôles de souvenirs, comme de petites parenthèses de néant dans votre vie. Il fallait rentrer au collège ou à la caserne. Vous attendiez sur le quai d’une gare dont vous ne vous rappelez plus le nom. Un peu plus tard, vous dormiez d’un mauvais sommeil sous les veilleuses bleues d’un dortoir. »

Patrick Modiano, Accident nocturne, Gallimard ed. 2003, p. 80-81

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