la bêtise

« C’est la raison, dit Rousseau, qui replie l’homme sur lui-même ; c’est elle qui le sépare de tout ce qui le gêne et l’afflige (…) ; c’est par elle qu’il dit en secret, à l’aspect d’un homme souffrant, péris si tu veux, je suis en sûreté. »
La bêtise n’est pas l’adversaire de l’intelligence, mais plutôt de l’intranquillité. La bêtise, c’est l’antalgique auquel on doit d’être indifférent aux souffrances d’autrui. La bêtise ne pense pas, mais elle est indispensable. De la même façon que les hommes sans courage se cachent dans la foule pour crier avec elle, la bêtise – tout en n’épargnant personne – donne le sentiment de la sécurité. Elle fait comme s’il suffisait d’avoir un toit pour être à l’abri, ou d’habiter dans une tour d’ivoire pour ne jamais mourir. Sous l’effet de la bêtise, l’intersubjectif devient l’interchangeable, l’intime devient l’impudique, l’insoumission devient l’institution. La bêtise s’impose quand la discussion capitule devant l’argument d’autorité, ou quand, à force de parler à tout le monde, celui qui parle n’a soudain plus rien à dire : la bêtise, c’est la « positive attitude ».
Gilles DELEUZE, « Différence et répétition« , Minuit ed

250805_la_betise_1

Ce contenu a été publié dans Textes & Images. Vous pouvez le mettre en favoris avec ce permalien.

10 réponses à la bêtise

  1. MTO dit :

    Et la bêtise est la chose qui ne cessera jamais de nous étonner…haut les coeurs…..

  2. perhaps dit :

    « La bêtise ne pense pas, mais elle est indispensable.  » nous dit Deleuze. Pensée éminement désagréable, à notre narcissisme,
    et qui, lorsque l’on s’y attarde nous rend en même temps plus sensible à nos humaines défaillances. Ce propos de Deleuze me renvoyait vers une question contigüe, celle de la « honte »…

  3. jlhuss dit :

    Excellente note.
    Je prends connaissance de votre blog et je mets un lien à cette note.
    Merci

  4. PROCES DE L’INTELLIGENCE EN TROIS TEXTES

    – Défense de la sottise –

    La sottise est le dernier rempart efficace contre la suprématie inique des beaux esprits qui ne gagnent leur cause qu’avec la lâche, fourbe, insidieuse subtilité de leur pensée.

    L’intelligence est torve, sinueuse, secrète. La sottise est franche, directe, claire. L’intelligence aime les énigmes, se complaît dans le mystère, se masque avec éclat. La sottise méprise l’obscurité, fuit l’hermétisme, se dévoile sans ambages. La sottise n’a rien à cacher, rien à prouver, rien à vendre, tout à perdre. Donc rien à gagner. L’intelligence caresse, séduit, convainc avec des fioritures de langage. La sottise cogne. Elle n’use d’aussi vains détours indignes de tout bon sot qui se respecte.

    Le sot aime les carottes, les navets et les soupes chaudes. Le bel esprit ne se préoccupe que d’affaires qui ne se mangent pas. Et qui vient se plaindre de crever de faim quand vient la bise ? Le sot ne porte pas le regard plus loin que son sillon. Le bel esprit le raille. Et qui vient crier famine l’hiver venu ? Le sot n’argumente pas, il frappe. En cela les faits lui donnent toujours raison, la loi en vigueur ici-bas étant celle du plus fort.

    Les sots ignorent l’alchimie étrange de la terre mais eux au moins y font pousser patates, poireaux, tomates. Les sots ne savent rien des mystères cosmiques, mais ils ont de quoi tenir l’hiver. Ils n’ont rien dans la tête mais tout dans les poings.

    Les sots n’ont pas d’amis mais plein de bois pour leur feu. Ils sont seuls mais heureux de l’être. Ils sont dépourvus d’intelligence et sans malice, sans ironie, sans vanité peuvent s’en vanter.

    Raphaël Zacharie de Izarra

    =======

    – Éloge de la bêtise –

    Je chéris et loue la bêtise. La bêtise est une haute qualité, une authentique vertu, le rempart absolu contre la souveraine et tyrannique intelligence qui l’écrase, la méprise, la persécute. La bêtise est l’apanage de ceux qui sont totalement dépourvus d’intelligence, et qui sont par conséquent remplis de saines certitudes, d’inébranlables convictions, de salutaires illusions. La bêtise empêche de trop penser, elle pousse à l’action irréfléchie. Elle éloigne et préserve fatalement l’être de la pensée stérile, creuse, futile.

    La bêtise rend toujours heureux tandis que la réflexion angoisse. La bêtise résout tous les problèmes de la pensée en éliminant tout simplement la pensée. Le penseur se crée des problèmes, l’intelligence est inconfortable parce qu’elle pose des questions embarrassantes à l’homme. Les gens intelligents se posent toujours des questions insolubles. Alors que les gens sots ne se posent tout simplement pas de questions : voilà le secret de leur bonheur.

    Les gens stupides cultivent leur jardin sans plus se poser de questions. Les gens intelligents se préoccupent plutôt du temps qu’il fait au-dessus de leur tête bien faite et en oublient totalement leurs activités horticoles. Ils s’y désintéressent parfaitement, préférant se torturer l’esprit avec des choses qui, aux yeux des gens bêtes, n’en valent pas la peine.

    D’où la supériorité de la bêtise sur l’intelligence qui force l’heureux élu à cultiver son jardin. Et avec coeur encore. Alors que l’intelligence ne fait rien pousser du tout sous les pieds de ses victimes bien pourvues.

    Raphaël Zacharie de Izarra

    =======

    – Encore un éloge de la bêtise –

    La bêtise est le privilège de ceux qui ne sont pas habités par la vaine et méprisable intelligence.

    L’intelligence, ce vernis de l’esprit… Cet habit d’apparat hautain et superficiel, cet artifice cérébral indigne de l’Homme, cette pollution mentale qui dénature si bien les pensées et met plein de mollesse dans le cerveau à la manière des substances nocives que l’on nomme héroïne, cocaïne, Marie-Jeanne… L’intelligence est un poison dangereux et la bêtise est son naturel antidote.

    L’intelligence empêche l’action, elle freine l’instinct et la saine pensée primaire. L’intelligence oblige les gens à penser de plus en plus et donc à faire des études, à se lancer dans la recherche. Elle excite la curiosité et génère maintes questions aussi difficiles qu’inutiles. En un mot l’intelligence pousse à la réflexion et de par ce fait empêche de vivre. Il est tellement plus agréable, plus facile de ne point penser et de se laisser guider par l’instinct, l’ignorance, l’innocence, ou par l’autorité ecclésiastique, politique, syndicale…

    Obéir sans penser, n’est-ce pas l’assurance de ne jamais commettre d’erreur par soi-même ? Jamais de remords avec la bêtise, puisqu’elle excuse à peu près tout. Alors que l’intelligence est au contraire un facteur de responsabilités pénales, morale, professionnelle. Plein d’ennuis en perspective avec l’intelligence…

    La bêtise heureusement empêche le développement de la pensée : c’est le confort de l’esprit par excellence. La bêtise est l’apanage des authentiques esthètes soucieux de leur qualité de vie.

    Raphaël Zacharie de Izarra

  5. TRISTE COMMEMORATION DE LA GUERRE

    Les morts des conflits mondiaux de 14-18 et de 39-45 n’ont pas héroïquement donné leur vie pour la liberté, ils sont morts parce qu’ils étaient obligés de marcher avec le troupeau, sous peine de passer au peloton d’exécution. Ce fut surtout le cas en 1914. L’héroïsme patriotique est une funeste invention, une macabre farce inventée par les marchands de canons et les gouvernants pour mieux mener à bien leurs grandes parties d’échecs planétaires. Leurs pions étant les petits soldats disciplinés pétris de culture patriotique nécessairement caricaturale et mensongère. Ce qui fut surtout le cas, je le répète, lors de la Première Guerre Mondiale de 1914-1918.

    Ce qui reste en 2005 de cette grande manipulation, ce sont quelques milliers d’imbéciles disciplinés qui se gèlent chaque matin du 11 novembre pour regarder hisser le drapeau tricolore, droits comme des piquets, alors qu’il seraient si bien à rester au chaud dans leur lit.

    Certains clament que parce qu’ils se sont comportés en patriotes, les morts de la 14-18 méritent le respect national… Certes, à condition que le patriotisme soit une valeur estimable. Or que ce que le patriotisme sinon la préférence égoïste pour ses compatriotes dans le meilleur des cas, la haine des étrangers dans le pire des cas ? L’honnête homme est citoyen du monde, non exclusivement citoyen de son pays. Mes frères chinois ne sont pas moins mes frères que mes frères français. Tous unis dans la fraternité, l’égalité, la liberté républicaine ! Mon frère français n’est pas plus égal, ne mérite pas plus la liberté que mon frère esquimau. D’où l’absurdité constitutionnelle du patriotisme. Et de la guerre, puisque par définition toute guerre est un crime contre l’humanité.

    Je remarque que plus le discours patriotique est primaire, acharné et s’adresse à des esprits simples, naïfs, sans défense sur le plan intellectuel, voire à de braves gens sans histoire, à des êtres franchement sots, à des sommités issues de villages isolés (parfois alcooliques), mieux il fonctionne. Plus on monte en visant la « cible intellectuelle », moins il a d’écho. Le patriotisme, c’est le sommet des capacités altruistes du petit français moyen discipliné. Pour un patriote de base, l’humanité s’arrête aux frontières du pays. Hors ces frontières, plus rien ne le concerne, ne le touche, ne l’intéresse.

    Raphaël Zacharie de Izarra
    2, Escalier de la Grande Poterne
    72000 Le Mans
    Tél : 02 43 80 42 98
    raphael.de-izarra@wanadoo.fr

  6. REPAS ENTRE AMIS

    Je me promenais d’un pas oisif comme à l’accoutumée lorsque, une fois n’est pas coutume, je passai par hasard devant chez les Trivieux, la famille « bruyante » du village. Gens au grand coeur, simples et joviaux, à la culture limitée mais au sens de l’accueil développé, ils ne purent se retenir de m’inviter à venir partager leur repas. Comment aurais-je pu dire non ? Un refus de ma part, même courtois, eût été mal interprété par ces esprits certes généreux mais fort susceptibles, prompts aux représailles verbales, voire à la franche querelle . Et puis n’était-il pas l’heure de manger après tout ? Cela me changerait agréablement de mes habitudes aristocratiques, pensai-je. D’autant que cette invitation impromptue formait là une circonstance heureuse pour approcher cette famille indigente, l’occasion inespérée d’étudier de près cette espèce sociale singulière.

    Famille au sort maudit, rongée depuis des générations par des problèmes sociaux multiples, les Trivieux n’en étaient pas moins des gens honnêtes, travailleurs, serviables, débrouillards, très attachés à leurs trois gros bergers allemands, prêts à se saigner aux quatre veines pour eux, payant sans rechigner les meilleurs vétérinaires quans il le fallait, ne lésinant pas sur leur nourriture, abondante et de qualité. Certes leur réflexion ne dépassait pas la hauteur de leur friteuse électrique, mais au moins avais-je affaire à des êtres sans aucune malice intellectuelle. Ce qui pour mon esprit las des intrigues mondaines paraissait plutôt reposant. Du moins au premier abord.

    J’allais vite déchanter.

    Dès que je fus attablé, diverses vagues sonores et alimentaires m’assaillirent de toute parts : un énorme plat de frites entourées de gros morceaux de porc ruisselant de graisse m’attendait, le bruit de fond inaudible de la télévision poussée presque à fond se mêlait aux grésillement infâmes venant de la radio mal réglée posée elle-même sur le poste de télévision, des canettes de bière bon marché s’entrechoquaient sur la table tremblant sous le séisme familial, les bergers allemands surexcités par ma présence ajoutaient leurs aboiements au concert, donnant à la cacophonie une allure irréelle d’orchestre furieux, diabolique, assourdissant !

    Le tout dans une atmosphère enfumée absolument irrespirable formée par les brumes âcres du tabac et les vapeurs vives de la friture. A ce brouillard artificiel se mêlaient les odeurs tenaces d’huile rance et d’haleines de chiens. Étourdi, je ne savais où donner de la tête. Mes hôtes riaient de me voir si bien entouré, n’imaginant pas un seul instant ma terrible solitude…

    Les agressions feutrées de l’esprit que j’avais l’habitude d’affronter dans les boudoirs furent remplacées ici par des agressions culinaires. Brutales. Les joutes verbales, ludique et élégante, si joliment cultivées dans les salons littéraires avait fait place chez les Trivieux à l’offense au goût, pure et simple. Le choc fut à la mesure de ma curiosité. A la fois fasciné et terrifié par la situation, je décidai de donner le change pour me sortir au plus vite de l’impasse. Je goûtai aux frites du bout des lèvres, feignant affectionner cette nourriture grossière. Je ne pus cependant me résoudre à toucher à la viande de porc. Comment expliquer à mes hôtes en termes accessibles que j’avais proscrit de mon alimentation cette viande que j’estimais impure ?

    Dans un élan désespéré je me levai d’un bond à peine le repas commencé pour me précipiter vers la sortie en débitant mille excuses académiques et inintelligibles qui seules pouvaient m’absoudre aux yeux de mes hôtes, impressionnés qu’ils avaient toujours été par la langue châtiée qu’ils ne pratiquaient point mais qu’imbécilement ils respectaient, de la même façon qu’un ignare respecte naturellement le chapeau de l’érudit.

    C’est ainsi que je pus sortir sans trop de dommage de cette instructive mésaventure.

    Les Trivieux ne m’en ont jamais voulu d’avoir quitté si hâtivement leur table. Ils continuent à me saluer dans la rue, comme si rien ne s’était passé.

    Ils ont pris ma fuite pour une simple diarrhée passagère.

    Raphaël Zacharie de Izarra

  7. (Le rock n’est pas du tout dans mes goûts personnels ni dans ma culture musicale et je n’y connais strictement rien en groupes de rock, mais pour des raisons qui me sont intimement personnelles Freddy Mercury fait exception. Je vous présente donc un texte directement inspiré du titre « The Show Must Go On » chanté par Freddy Mercury.)

    +++++++

    LA MORT

    Lorsque claquera la Porte, s’ouvrira le grand show cosmique.

    Effrayant, inouï ou intime et serein selon l’imagination, les craintes ou les espérances de chacun, le passage ne sera finalement qu’une formalité.

    Au-delà de la pourriture, la Lumière.

    L’atroce, l’immonde, l’épouvantable pourriture est l’ultime illusion à chasser, le dernier piège à éviter, la suprême insignifiance à mépriser. Une fois le cadavre sous la stèle, le spectacle doit continuer. Après les horizons bornés du temps, l’Éternité. Qui n’est rien d’autre que l’affranchissement de la conscience d’un cadre physique, matériel, la libération de l’esprit des limites d’une durée linéaire.

    La mort est une aventure à vivre, une expérience unique à ne manquer sous aucun prétexte. La mort, voyez-vous c’est aussi l’humour.

    Nos restes que dévore le ver et que corrompt la fange ne sont qu’inoffensives grimaces de la matière. Et le marbre recouvrant nos os, qu’un masque grotesque. Rien que des drôleries puantes. Pas de quoi élever des autels, et nul besoin non plus de les conserver dans des bocaux ou de les embaumer. Chaque destinée est un trésor autrement plus intéressant que ces puériles poteries funéraires.

    Un homme qui meurt laisse tout derrière lui, c’est une banalité de le dire. Pourtant, la plupart des gens follement attachés à ce qui est périssable s’acharnent à accumuler passionnément des biens temporels. Peut-être à travers ces possessions ont-ils l’impression de prolonger, densifier leur existence… Châteaux et or, qui ne sont qu’assemblages d’atomes voués à de perpétuelles transformations et recyclages -même si c’est à l’échelle géologique-, châteaux et or disais-je contempleront du haut de leur immuable indifférence leurs maîtres lorsque ces derniers seront étendus au fond de leur cercueil. Envers ceux qui leur auront manifesté de chaleureuses affections, les objets se montreront bien ingrats à l’heure du grand départ…

    Aussi, préférons un sage et relatif détachement à l’égard de la matière. S’enchaîner à ce fardeau de poussière, c’est s’embarquer pour le grand Ailleurs avec d’amers mirages. Le dépouillement matériel libère l’esprit, allège le coeur.

    L’existence terrestre est l’apprentissage grandeur nature de l’Homme et sa dépouille en route pour le cimetière, le point limite entre deux extrêmes. Derrière, la misère. Devant, l’infini.

    Nul ne connaît la mort, personne n’a jamais côtoyé le Mystère, aucun vivant ne peut dire un mot de ce qui se passe dans la tombe mais tous ont l’intuition d’un endroit sans limite. Même les plus sots, les plus noirs, les plus incrédules, les plus obtus, les plus lourds des esprits ont cette intuition.

    La tombe n’étant que le promontoire de l’infini, répétons-le, le grand show doit continuer…

    Raphaël Zacharie de Izarra
    raphael.de-izarra@wanadoo.fr

  8. Marie dit :

    Votre besoin de communiquer est touchant. Je vous remercie de la profusion de paroles que vous déversez gratos sur les pauvres nullards qui flottent dans l’espace virtuel et qui, tels des bulles de savon, au contact de votre fleuve de lumière, pètent en silence et se dissolvent en Vous.

    Merci. Je ne peux vous approuver car l’on n’approuve que ce qui est extérieur à soi, différent et nous ne formons qu’Un même si comme moi, vous l’ignoriez il y a quelques instants. C’est le miracle de la vie. Grâce à vous, et à distance.. j’atteins l’UN.

    Un détail m’étonne: pourquoi ce besoin de communiquer? Et avec une telle fougue … pour ne pas dire passion?

    J’ai lu votre modeste présentation et quelques textes. Je me présente par courtoisie, comme vous l’avez fait, car ce vilain format email est en réalité un beau sofa de velours rouge, dans un salon rococo, nous sommes tous les deux assis sous une plante tropicale, un verre à la main, et un vague jazz rafraîchit l’atmosphère. Je suis née sur le bout du croissant rouge de l’Orient arabe, et je m’ennuie en Occident, comme vous, comme nous nous ennuierions ensemble ou tout seuls, partout. Jazz ou pas, plantes et sofas, ou pas.

    Je partage donc votre ennui et c’est délicieux. La seule différence entre nous, et elle est insignifiante, est que vous êtes un homme et moi une femme.

    Les charmeurs de ces jolies dadames sont en général trop prévisibles, et tout ce qui concerne les oeillades, hormones et échanges de services génitaux représente pour moi la quintessence de l’Ennui. Vous semblez impressionné par l’appareil reproductif (et par le tube digestif ..) et c’est peut-être la seule chose que j’aurais à redire si je voulais absolument critiquer votre image Web et vos brillants articles.

    Mais que vous soyez ou pas un pratiquant passioné de l’Ennui ne change rien puisqu’après cette brève et douce rencontre nous ne nous verrons plus.

    Je ne vous oublierai pas,

    Marie

  9. BUVEZ !

    Le vin vaut bien vingt dieux, deux ou trois faux pas et quelques jurons !

    Buvez car la vigne n’est pas mauvaise pour le coeur assoiffé. Buvez, des lutins dorés vous descendront dans le gosier. Buvez surtout de peur de vous noyer dans une eau qui nécessairement sera plate.

    Buvez, humains. Buvez, chiens que vous êtes ! Buvez, braves braillards ! Votre joie vous sanctifie, fait de vous des hommes. L’ivresse est bonne, saine, féconde : elle délie les langues, rosit la sombre mélancolie, rallume les âmes. Et inspire toutes les natures.

    Le breuvage alcoolique bonifie les caractères, allège les idées et adoucit même les crapules. Ce qui fait tourner les têtes fait monter les âmes.

    Il n’y a que les fous qui chantent sous l’eau de pluie.

    Et vous les abstinents buvez plus que les autres car en vérité je vous le dis, le salut de votre gorge asséchée est dans la bière, le petit rosé et l’eau-de-vie.

    On prétend que le vin rend méchant, sot, imprudent. Fadaises ! Les corrompus, les ânes, les écervelés, ce sont les buveurs de lait ! Ces mesquins ne connaissent pas l’or de l’esprit. Méprisant les hauteurs éthyliques, ils ne sont jamais dans le secret des dieux de la bouteille. Ce bonheur à portée de lèvres, ils le boudent pour un oui, pour un non. Et ils meurent un jour. Sans feu, sans joie, sans bruit.

    Imbibés d’eau.

    Et ils font un petit plouf ! Et ils appellent cela « dignité »…

    Tandis que le buveur, hydraté avec l’onde dorée, brune ou verte, meurt à voix haute, la tête la première, le souffle vif, le coeur battant.

    Et fait un magnifique plongeon.

    Raphaël Zacharie de Izarra
    raphael.de-izarra@wanadoo.fr

  10. Raphaël Zacharie de IZARRA - raphael.de-izarra@wanadoo.fr dit :

    A OSTENDE

    A Ostende l’onde est un songe, la lumière une vague, l’écume une bière âcre.

    Là-bas les mouettes se lamentent et les hommes ont l’âme lourde, ce qui est hautement réjouissant car à Ostende tout ce qui gémit est béni.

    On vient à Ostende non pour y mourir mais pour voir mourir : dans cette ville en perpétuel automne la mélancolie est un spectacle intime. Les nuées y sont sombres, les âmes brumeuses, les flots lumineux.

    A Ostende au casino face à la mer on joue, on perd, on pleure : on est heureux.

    Dans cette capitale de la nostalgie l’amour est lunaire, la mort intermédiaire, la vie un interminable regret.

    L’existence y est pâle, sereine, quasi funèbre. C’est la chose la plus délicieuse d’Ostende.

    A Ostende il y a plein de vieilles en rouge à lèvres qui traînent leurs secrets d’amour glorieux et désuets : dans la ville flamande une tendre poussière recouvre les coeurs séniles.

    Ostende est une ville égarée entre la mer et les étoiles, figée dans un siècle de naphtaline.

    Raphaël Zacharie de IZARRA

Laisser un commentaire