Selon 9 (Théâtre)

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SELON 9 Théâtre

La scène serait recouverte d’une lumière fantomatique au travers de laquelle Sam échapperait à la distinction. Il tiendrait en main les feuillets de son Journal, texte — toujours en cours — et qui à mesure que le temps passera, seront dispersés sur le plateau.
Tantôt il lira son Journal, tantôt il écoutera une voix en lui, (voix « off ») tantôt il s’adressera à une personne peut-être imaginaire… (Adressées)

SELON, textes 1 à 7 du 25 au 31 mars 2005

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Lecture du Journal
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Voix « off »
Décomposons l’image, on sait le faire aujourd’hui. Figurons ce qui a été probable dans l’ordre du monde et ce que l’on observe en réalité. Réalité. Voilà un mot qui… Il y autant de réalité que de personnes… Déjà dit. Mais encore ? Fermez les yeux ça vaut mieux. Drôle d’expression : « Ca VAUT mieux ! »

Adressées
Sylvia, tu m’entends ? Tenez vous-le pour dit. Il y a que des personnages. Celle-là, là-bas derrière elle sert à me faire parler. Ecrire, qui le peut ? Toute l’écriture n’est qu’une parole retravaillée. C’est parce qu’on n’est pas certain de parler qu’on s’emploie à écrire.
Retourner à la page, à la ligne suivante, au mot prés, celui qui précède juste celui qui suit. Ordre, ordre. SELON ! Je suis épuisé. Combien de temps va durer cette folie ? Il est là ce livre ? Mettre tout dans un livre. Le Livre… Racontez-moi une histoire. Combien de personnages, vous dites ? Autant que vous voulez ! En vérité, il y en a toujours un seul. Un. Homme, femme ? Sexe indifférent. « Y a pas d’sexe ! » « Y a d’l’UN ! » Il est pas mort fou le docteur qui proférait ces paroles ? Non !
On multiplie les personnages et les histoires avec eux. Mais une seule, une seule histoire, celle de la mort dans la vie et vice versa. Ne croyez pas qu’on invente. Quand la première pensée a été déposée dans une tête, elle portait déjà sur une question : “jusqu’où ça va aller ?” Après, quand on s’est un peu habitué à la question, on s’est regardé et on s’est demandé : “Mais d’où qu’ça vient ?” Foutaise ! Fallait pas advenir ! Non ? Ou autrement ! Mais comment ? Question vaine.

Voix « off »
Fumée, fumée. Volutes entières qui se décomposent à vue de nez.

Adressées
Oui. Tu m’entends Sylvia ? Dis ! Manifeste-toi pour voir ! Alors ? Rien…, toujours rien… Et l’autre qui criait : “ce rien je vous le laisse.” Volutes, volutes, partout. Entourant la masse du visage qui disparaît sous l’écran nuageux. Je me démène pour comprendre ce qui m’arrive. A quoi bon ! Dis un peu ! Tu ne me veux pas me répondre ?… Je t’en prie… Ils ont organisé le cortège. Prévu les temps d’arrêt, de passage, en fonction du soleil de sorte qu’il a éclairé la multitude, de part en part. De part en part… Totalité impossible. Où est la fêlure ? A la naissance du cou ou dans cette zone intermédiaire qui va des yeux jusqu’aux cheveux. Zone de la vision et du désir. Mélangés.

Lecture du Journal
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Adressées
Et si ?… Non, croyez-vous ? Passez par là. Non ? Comme vous voulez. Je n’ai jamais pu obligé quiconque à emprunter une voie, si large soit-elle. Cela demande un effort de tous les dieux.

Lecture du Journal
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Voix « off »
J’ai juste le temps de percevoir ces mots avant qu’elle disparaisse derrière une façade. Non, ces mots viennent à moi en traversant des couches d’air fluides et moirées. La parole permet de voir l’air. C’est entre les lignes, dans ces espaces d’où émergent, des droites, des arrondies, des oblongues, des points suspendus : les lettres. L’écriture viendrait du dessin. Mais l’ordre des mots, l’ordre des traces : de quelle physique ? “Allez circuler ! Vous n’allez pas bloquer la chaîne avec vos questions. Y a mieux à faire !” Il y a toujours mieux à prescrire quand on étreint tout questionnement possible par le silence. Pas le retrait, le silence ! Ne nous trompons pas de posture. Attention !

Adressées
Elle continue à marcher au loin. Ce n’est plus qu’un point tremblé à l’horizon mais je la vois continuer. Sait-elle que je l’observe de loin ?

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